C'est la deuxième semaine de la Conférence mondiale des Nations unies sur les

Climat

Pologne : climat, charbon …. et hésitations

C’est la deuxième semaine de la Conférence mondiale des Nations unies sur les changements climatiques, la COP.

Mise à jour du 21 novembre : les ONG ont décidé ce matin de se retirer des discussions. Nous, société civile, avons déjà affirmé notre solidarité avec les victimes du super typhon Hayian, ainsi qu’avec tous ceux qui subissent les impacts des changements climatiques. Cette solidarité nous pousse à exposer ce qui se passe vraiment à la Conférence Mondiale de Varsovie sur les changements climatiques. (Voir l’intégralité du communiqué de presse du Réseau Action Climat France)

Cette 19ème édition de la COP se tient à Varsovie, en Pologne. 194 nations sont donc rassemblées pour cette « conférence de transition » visant à préparer l’édition de 2015 qui doit aboutir à un accord mondial pour faire face aux changements climatiques. Le 5ème rapport du GIEC présenté en septembre 2013 a planté un décor très concret pour cette COP de Varsovie, en affirmant que l’essentiel des énergies fossiles doit rester sous terre et que les émissions de Gaz à effet de serre (GES) doivent être réduites à un niveau proche zéro d’ici 2070.

(pour une lecture décryptée du rapport du GIEC voir le site du Réseau action climat : http://leclimatchange.fr/)

COP19 Projection on Coal Power Station Opole
Greenpeace-Aktivisten demonstrieren gegen Kohlekraftwerke

Et si les politiques ouvraient les yeux ?

C’est le constat fait par les experts du GIEC : le lien entre les activités humaines et l’accroissement des températures constaté depuis 1950 est extrêmement probable. Le niveau de certitude a augmenté : il était jugé très probable lors du rapport de 2007 et seulement probable dans le 3ème rapport en 2001.
Le GIEC n’est pas le seul à tirer très fort le signal d’alarme.

Les pays du Sud sont ceux qui sont le plus durement touchés par les ravages faits par les catastrophes climatiques. Les Philippines, qui viennent d’être dévastées par le passage du typhon Haiyan font d’ailleurs partie des pays les plus affectés en 2012, en termes de pertes humaines et matérielles, d’après l’étude publiée par GermanWatch, un think tank allemand.
(pour aller plus loin sur cette étude, lire l’article sur le Figaro.fr : Catastrophes climatiques : les pays pauvres payent le plus lourd tribut)

Infographie de la Banque Mondiale sur les impacts des CC

À Varsovie, un certain cynisme…

En ce moment même Varsovie accueille non seulement la Conférence mondiale des Nations unies sur les changements climatiques, mais aussi un Sommet mondial sur le charbon. Alors que la COP s’attache à trouver des solutions diplomatiques aux bouleversements climatiques, la Pologne organise un sommet sur l’énergie fossile, la plus abondante et la plus sale qui soit. Accueillir un événement de promotion de l’industrie du charbon pendant une conférence sur le climat, c’est gifler tous ceux qui souffrent des impacts catastrophiques des changements climatiques.

World Coal Summit Protest in Warsaw
Protestbanner vor Kohlegipfel in Warschau

Greenpeace a protesté lundi matin : des activistes de 20 pays sont montés sur le toit du Ministère de l’économie pour dénoncer la tenue de ce sommet en parallèle à la Conférence mondiale sur le climat. Ils ont déroulé une banderole sur laquelle on pouvait lire « Qui gouverne le monde ? Les industriels ou les citoyens ? » encerclée de drapeaux des États-Unis, de l’Allemagne, de l’Australie ou encore de l’Union européenne.

Et la question est légitime … Qui gouverne le monde ?

Car les pays reculent, les uns après les autres : l’Australie et le Japon ont en effet annoncé avoir revu à la baisse leurs ambitions climatiques. L’Australie a commencé par abroger sa législation nationale, en supprimant son projet de taxe sur le carbone et en mettant fin à son soutien au développement des énergies renouvelables. Cette annonce est intervenue alors que le ministre de l’environnement japonais lançait une bombe climatique : alors qu’il s’était engagé à réduire ses émissions de 25%, le Japon devrait annoncer que finalement, son nouvel objectif est… de les augmenter de 3% !

Mais, et l’Europe ?

Le contexte pour les pays touchés par les changements climatiques, et le recul des grandes puissances économiques du monde industrialisé laissent l’Europe face à un choix : revoir ses ambitions à la baisse comme les autres, ou faire le choix de la transition énergétique parce que c’est la seule voie possible pour sécuriser les approvisionnements énergétiques, maîtriser les montants à investir dans l’énergie, créer des emplois pérennes et répartis sur l’ensemble du continent, et lutter contre les changements climatiques.

Effets attendus du changement climatique sur différentes régions de l’Union européenne – source Commission européenne

Revoir à la hausse l’objectif européen de réduction de gaz à effet de serre est indispensable. Mais il manque aussi aujourd’hui le moyen obligatoire pour l’atteindre : l’Europe doit se fixer un objectif renouvelable ambitieux et contraignant. Sinon ce sera mission impossible.Pour atteindre cette ambition tous les objectifs fixés doivent être contraignants, sur le climat, les renouvelables et les économies d’énergie.

Pourquoi ce trio ? Parce qu’un mécanisme seul reposant sur le prix carbone (ETS) ne conduirait qu’à développer les technologies matures au détriment des technologies nécessitant encore un soutien pour devenir prometteuses tant sur le plan énergétique qu’économique.

Une Europe qui choisirait de ralentir ou d’abandonner son projet de transition énergétique le paierait cher : augmentation de sa dépendance vis-à-vis des importations d’énergie (54% de l’énergie fossile consommée est importée), renoncement à ses avantages compétitifs dans l’économie verte, un outil pourtant au service d’une reprise économique, mise à mal des relations diplomatiques avec des pays qui représentent des marchés clefs et qui sont de plus en plus vulnérables aux risques climatiques…

Avoir un objectif renouvelables ambitieux et contraignant c’est aussi garantir une approche positive des politiques climatiques européennes en développant une industrie pourvoyeuse d’emplois.

La France qui fait du climat un enjeu fort pour elle en proposant d’accueillir la COP en 2015, doit défendre l’objectif de 45% de renouvelables dans le cadre du Paquet énergie climat. C’est l’unique voie pour atteindre l’objectif de 55% de réduction de GES en 2030 (par rapport au niveau de 1990).

La France se doit de montrer l’exemple sur son territoire.

Elle doit confirmer sa promesse de réduction à 50% de la part du nucléaire avec la fermeture de réacteurs nucléaires additionnels mais aussi avec un fort développement des renouvelables. Or ce n’est pas le cas pour le moment. François Hollande soutient un objectif de 40% de gaz à effet de serre pour 2030 (là où 55% serait nécessaires), reporte aux calendes grecques la discussion sur les moyens d’atteindre cet objectif – la discussion sur les renouvelables n’aurait lieu qu’après les élections européennes – et n’envisage pas pour le moment la fermeture de réacteurs nucléaires autres que ceux de Fessenheim !

L’Europe doit adopter une politique énergétique claire. Le flou d’aujourd’hui ne satisfait personne.
Il faut cesser les investissements des les énergies sales, comme le charbon, le pétrole ou le nucléaire pour les transférer vers les énergies renouvelables.

Pour toutes ces raisons, Greenpeace demande à l’Union Européenne de se doter d’un cadre énergétique de long terme et ambitieux. Un tel cadre a besoin d’un objectif renouvelable contraignant de 45% à horizon 2030 pour fonctionner.