L’accident nucléaire de Fukushima a eu lieu il y a cinq ans maintenant, le 11 mars 2011. Celui de Tchernobyl, il y a 30 ans : le 26 avril 1986. Avec quelles conséquences ? Quelles traces en reste-t-il, des années après ? Jusqu’où s’étend la pollution nucléaire ? Nous avons mené des recherches poussées en Russie, en Ukraine et au Japon pour répondre à ces questions et publions aujourd’hui un <a href=rapport scientifique [en] qui en compile les résultats. Et tire la sonnette d’alarme." class="openspace_image openspace_image_medium" />

Nucléaire

Tchernobyl, Fukushima : le désastre nucléaire continue

L’accident nucléaire de Fukushima a eu lieu il y a cinq ans maintenant, le 11 mars 2011. Celui de Tchernobyl, il y a 30 ans : le 26 avril 1986. Avec quelles conséquences ? Quelles traces en reste-t-il, des années après ? Jusqu’où s’étend la pollution nucléaire ? Nous avons mené des recherches poussées en Russie, en Ukraine et au Japon pour répondre à ces questions et publions aujourd’hui un rapport scientifique [en] qui en compile les résultats. Et tire la sonnette d’alarme.

 Des millions de gens touchés

Les conséquences de Tchernobyl et Fukushima continuent de se faire sentir jour après jour pour des millions de gens. Comme une agression quotidienne. D’après nos recherches, les survivants de Tchernobyl, dont plusieurs centaines de milliers ont été contraints d’abandonner leur logement pour s’établir plus loin, continuent par exemple de manger de la nourriture contaminée dans des proportions largement supérieures aux normes en vigueur. Et 5 millions de personnes environ vivent encore dans des zones contaminées.

Au Japon, ce sont près de 100 000 personnes qui n’ont toujours pas pu rejoindre leur maison – et une bonne partie d’entre elles ne le pourra sans doute jamais, malgré la rhétorique illusoire du gouvernement japonais qui continue de minimiser le problème. Nos recherches montrent par exemple que les forêts qui entourent Fukushima et Tchernobyl forment des sortes de “réservoirs” de radioactivité, générant des risques de santé publique forts pour les communautés qui vivent encore à proximité.

Recueil de données concernant la contamination des forêts et de la nourriture, Ukraine, Septembre 2015 © Denis Sinyakov / Greenpeace

Des gouvernements irresponsables

Mais le plus inquiétant, c’est le fait que les gouvernements en place, qu’il s’agisse de ceux du Japon ou de ceux propres aux pays contaminés par Tchernobyl, sont tous en train de réduire les mesures de radioprotection des populations. Les programmes de surveillance alimentaire autour de Tchernobyl ont ainsi été largement réduits. Quant au gouvernement japonais, il invite les habitants à retourner “ chez eux ” dès 2017, alors même que le territoire de Fukushima est encore bien loin d’être décontaminé. C’est pourquoi nous appelons les autorités politiques à poursuivre leur soutien financier envers les survivants de Tchernobyl et Fukushima, afin qu’ils puissent continuer à vivre à distance des radiations.

Commerces et maisons abandonnées à Namie, Fukushima, 2014 © Christian Aslund / Greenpeace

Un enjeu de santé publique

Car il s’agit là d’un problème de santé publique. Nous avons par exemple observé des impacts graves sur la santé des individus appartenant aux communautés concernées par les accidents de Tchernobyl et Fukushima. Au sein des zones contaminées, le taux de mortalité est en effet nettement supérieur à la normale, le taux de natalité est quant à lui inférieur. La prévalence du cancer et des maladies mentales en forte hausse. A Fukushima, une expansion du cancer de la thyroïde sévit parmi les enfants. Et un tiers environ des mères vivant à proximité ou dans les zones contaminées montrent des symptômes de dépression.

Sortir enfin de la mythologie nucléaire

Les conséquences du nucléaire sont donc dramatiques pour des millions de personnes. C’est un fait. Le nucléaire est un désastre à long terme. Pas un accident spontané qu’il suffirait de réparer – ou d’oublier. Et les leçons de Tchernobyl et Fukushima doivent être inlassablement répétées pour tordre le cou aux idées reçues qui continuent de circuler en dépit du bon sens : non, le nucléaire n’est pas une énergie sûre. Non, le nucléaire n’est pas une énergie propre.

Le gouvernement japonais a récemment décidé de relancer deux réacteurs nucléaires. Heureusement, la justice vient de s’y opposer : « A la lumière de l’accident de Fukushima (…) il reste des interrogations sur les mesures de protection vis-à-vis d’un tsunami et concernant les plans d’évacuation« , a souligné le juge. Espérons qu’il soit entendu. Exigeons surtout que les gouvernements du monde entier décident une bonne fois pour toute de se tourner vers les énergies renouvelables, aujourd’hui prêtes à prendre la relève des énergies fissiles et fossiles à grande échelle.

Les leçons en terme de sûreté n’ont pas été tirées

Que ce soit au Japon comme en France, les autorités n’ont pas suffisamment pris en considération le retour d’expérience de ces tragédies, qui aurait dû amener à fermer bon nombre d’installations immédiatement. En France, les centrales nucléaires de Fessenheim, Bugey, Gravelines, Tricastin et Blayais sont une menace immédiate du simple fait de leur vétusté. Mais aussi d’inondations potentielles ou de risques sismiques. Elles sont une épée de Damoclès pour les populations.

Bien que certaines mesures aient été prises, notamment sous la pression de l’Agence de sûreté du nucléaire (ASN), celles-ci ont en réalité été pensées uniquement pour assurer la continuité du fonctionnement du parc actuel, sans imaginer qu’un arrêt de certaines centrales – pourtant nécessaire – puisse être possible. Le gouvernement français, de son coté, fait tout pour tenter d’oublier et de faire oublier ces catastrophes historiques. Un immobilisme coupable, et dangereux.