En nous basant sur les derniers comptes-rendus du GIEC, et sur d'autres études récentes, nous vous livrons ci-dessous les 10 points clés sur les changements climatiques.

Climat

Comprendre (et contrer!) les dérèglements du climat en 10 points clés

En nous basant sur les derniers comptes-rendus du GIEC, et sur d'autres études récentes, nous vous livrons ci-dessous les 10 points clés sur les changements climatiques.

Le Groupe intergouvernemental d’experts sur l’évolution du climat (GIEC) est en train de mettre la dernière main à son 5e Rapport d’évaluation. Ce document est d’une importance cruciale, mais il est aussi très long et très technique. Pour nous, les questions sont simples : à quel point la situation est-elle grave? Quelles solutions mettre en œuvre?

1. Des responsables politiques qui parlent beaucoup mais agissent peu

Les responsables politiques répètent à l’envi qu’il est urgent de réduire nos émissions de gaz à effet de serre, à l’origine du réchauffement de la planète.
Pourtant, les émissions de GES ne cessent de croître : entre 2000 et 2010, elles se sont accélérées à un rythme record. Pourquoi ? Parce que nous consommons toujours plus de combustibles fossiles pour faire tourner nos économies. Les scientifiques sont pourtant clairs : nous devrons à terme complètement éliminer nos émissions anthropiques pour éviter un emballement dangereux du climat. Malgré ces avertissements, les objectifs climat-énergie que vient de se fixer l’Union européenne sont loin d’être à la hauteur des enjeux. (lire sur le site du Réseau Action Climat : Les chefs d’Etat et de gouvernement européens optent pour le plus petit dénominateur commun )

Archive : déjà en 2008, Greenpeace pointait les discours sans actes

Maintenant, c’est quand ? par gpfrance

2. Si nous n’agissons pas, la situation va empirer

Le temps presse et nous risquons de payer notre inaction au prix fort. Sans réduction rapide des émissions, le climat va devenir de plus en plus chaud, chaotique et imprévisible et ce, de façon inégale en fonction des régions.
Feux de forêts, vagues de chaleur, pertes de production alimentaire ne seront plus l’exception mais la règle. Avec l’augmentation du niveau des eaux, les États insulaires tropicaux seront submergés, et des mégapoles comme Londres ou New York seront aussi touchées. Le taux d’extinction des espèces va augmenter, et des écosystèmes entiers seront fortement menacés. Les scientifiques ont identifié des « points de basculement », c’est-à-dire des seuils de réchauffement qui, une fois atteints, peuvent déclencher des changements au niveau de certaines composantes majeures du système climatique. Ainsi, bien que les émissions augmentent progressivement, les conséquences des changements climatiques pourraient se manifester par un basculement « brutal ». Si nous tardons à réduire nos émissions, certains de ces « basculements » seront irréversibles ou, au mieux, difficiles à inverser.

Émissions de CO2 liée à la combustion fossile (c) Enerdata Yearbook

3. Non, il n’est pas trop tard pour agir

Jusqu’à présent, la température moyenne à la surface de la terre a augmenté d’environ 0,85 °C par rapport à l’ère préindustrielle. Les dirigeants internationaux ont convenu qu’il fallait diminuer nos émissions pour limiter le réchauffement à 2 °C maximum. Mais selon des études scientifiques récentes, même avec un réchauffement de 2 °C, certaines régions du monde seront durement touchées, certaines étant déjà victimes de bouleversements. La bonne nouvelle, c’est que d’après le GIEC, il est encore possible d’atteindre cet objectif – à condition de réduire nos émissions de 70 à 95 % d’ici à 2050.

4. La [R]évolution énergétique est indispensable

Mais au fait, d’où viennent les émissions de gaz à effet de serre (GES) ? Et comment s’en débarrasse-t-on ? Plus de 80 % des émissions anthropiques de GES proviennent de notre utilisation de combustibles fossiles (principalement du charbon, du pétrole et du gaz naturel). La logique est implacable : pour se débarrasser des émissions, il faut commencer par se débarrasser des combustibles fossiles. Le GIEC l’affirme : si nous voulons éviter un emballement du climat, nous devons transformer l’ensemble de notre système énergétique et apprendre à nous passer progressivement des énergies conventionnelles que sont le charbon, le pétrole et le gaz.

Pour remplacer les combustibles fossiles, nous avons toute une panoplie d’alternatives. Mais avant tout, nous devons renforcer notre efficacité énergétique, c’est-à-dire la façon dont nous stockons, transportons et utilisons l’énergie, de façon à en perde et à en gaspiller le moins possible. Sur d’autres fronts, nous devrons aussi stopper la déforestation et rendre la production alimentaire plus durable.

TRICTLY

5. Exit le charbon…

Le charbon est le plus sale de tous les combustibles fossiles. Il représente 73 % des émissions liées à la production d’électricité, d’après le New Climate Economy Report. Entre 2000 et 2010, sa consommation a rapidement augmenté, surtout en Asie.
Pour faire face au problème des changements climatiques, en finir avec le charbon est indispensable. La courbe de la croissance du charbon semble avoir récemment amorcé une inflexion. En réalité, l’évolution récente de la situation en Chine (pays qui consomme la moitié du charbon produit sur la planète) n’a pu être prise en compte dans le rapport du GIEC. Les problèmes liés à l’industrie du charbon sont de plus en plus reconnus par la communauté internationale et les responsables politiques. Outre ses effets négatifs sur le climat, le charbon est aussi à l’origine de pénuries d’eau et de dégâts environnementaux. La pollution de l’air due aux rejets des centrales à charbon est un problème de santé humaine majeur. Se débarrasser du charbon améliorerait le quotidien et la santé de millions de personnes et sauverait de nombreuses vies. D’après l’Organisation mondiale de la santé (OMS), un million de personnes meurent prématurément chaque année à cause de la pollution des centrales à charbon. De plus, les investisseurs ont commencé à prendre conscience que cette énergie était sur le déclin et sont de plus en plus réticents à lui prêter des fonds.

Pollution de l’air à Pékin – Photo (c) Greenpeace / Zhang Tao

6. Exit aussi les fausses bonnes solutions comme le nucléaire et le CSC

On entend dire que le nucléaire et le captage et stockage du carbone (CSC) sont des technologies qui pourraient contribuer à la réduction des émissions. Mais il n’est est rien dans la pratique.

Le nucléaire, qui fournit actuellement à peine 10,8 % de l’électricité à l’échelle mondiale, est en déclin. Le parc mondial vieillit, et le développement de nouvelles centrales se caractérise par des coûts astronomiques et des retards de plusieurs années voire décennies. Le problème du stockage des déchets n’a toujours pas été résolu… Et l’impopularité de cette énergie dangereuse s’est encore accentuée depuis l’accident de Fukushima. De plus, d’après le GIEC, l’abandon du nucléaire n’aurait pas beaucoup d’effet sur les réductions d’émissions.

Concernant le Captage et Stockage du Carbone, CSC, les projets de développement sont abandonnés les uns après les autres en raison des coûts prohibitifs et du manque de résultats à la clé. L’installation de cette technologie est si coûteuse et nécessite de si grandes quantités d’eau qu’elle n’est pas viable sur le plan économique. Nombre des modèles de réduction des émissions proposés par le GIEC incluent le CSC. Pourtant, cette fausse bonne solution n’est pas nécessaire : d’autres modèles permettent d’atteindre les mêmes réductions sans avoir recours au CSC ! Le CSC est un remède pire que le mal. Pourquoi financer une technologie qui ne sera pas disponible à temps, va coûter très cher et risque d’être polluante ? Les énergies renouvelables, l’efficacité énergétique n’ont aucun de ces défauts. Elles s’inscrivent dans une révolution énergétique indispensable au vu des changements climatiques actuels. Le CSC conforte au contraire un modèle dépassé : recours au charbon, émissions de gaz à effet de serre, dangers pour l’environnement. Lire en détails.

Screenshot from 2014-04-01 12:26:39

7. Les énergies renouvelables sont en plein essor, et ce n’est pas fini !

Aujourd’hui, un 1/5 de l’énergie produite dans le monde provient de sources renouvelables. Et leur potentiel est loin d’être exploité ! Chaque région du monde peut produire assez d’énergie renouvelable pour couvrir 2,6 fois ses besoins ! Les EnR connaissent une progression fulgurante et deviennent de plus en plus abordables. En réalité, l’énergie éolienne est désormais la nouvelle source d’électricité la moins chère sur de nombreux marchés, tandis que les prix du solaire photovoltaïque ont baissé de 80 % depuis 2008, et devraient continuer de diminuer.
À l’heure actuelle, l’hydroélectricité est l’énergie renouvelable la plus répandue à l’échelle mondiale, mais le solaire et l’éolien progressent rapidement. Entre 2005 et 2012, l’éolien a été multiplié par cinq et le solaire par 25. À ce rythme, le solaire pourrait devenir la première source d’énergie mondiale d’ici à 2050  http://www.irena.org/rethinking/Rethinking_FullReport_web_view.pdf ! La transition énergétique est donc déjà en marche, mais il est nécessaire de l’accélérer. Les gouvernements doivent davantage améliorer la rentabilité des investissements dans les sources d’énergies vertes et propres, par rapport aux combustibles fossiles.

Le nucléaire quant à lui est un secteur en déclin face au développement croissant des filières renouvelables. Avec son obstination pour le nucléaire, la France navigue à contre-courant et se prive de nombreuses opportunités. Ce retard s’illustre en trois chiffres : en 2013, les investissements mondiaux dans l’éolien ont été cinq fois supérieurs à ceux du nucléaire (pour un montant de 215 milliards de dollars contre seulement 42 milliards pour l’atome). Quand l’Allemagne a réalisé un chiffre d’affaires à l’export en 2013 de 13 milliards d’euros pour les renouvelables (chiffre cumulé pour le solaire et l’éolien), la France, quant à elle, s’est contentée de 5,6 milliards d’euros pour le nucléaire. Sur la dernière décennie, quand la puissance installée du solaire et de l’éolien a cru de 403 gigawatts électriques (GWe), celle du nucléaire a reculé de 32 GWe, soit l’équivalent de la moitié du parc français.

8. Il faut laisser les réserves fossiles inexploitées là où elles sont

Des réserves de charbon, de pétrole et de gaz n’ont pas encore été exploitées. Mais si nous voulons éviter les pires impacts des changements climatiques et rester sous la barre fatidique des 2°C d’augmentation des températures, nous devons impérativement laisser ces réserves là où elles sont. C’est pourquoi les programmes d’exploration et autres projets de forages sont totalement illogiques et insensés, comment les projets en Arctique par exemple.

9. L’inaction nous coûtera beaucoup plus cher que l’action

Les scientifiques ont tenté de chiffrer le coût des mesures que nous devons prendre pour empêcher un emballement climatique. Ces coûts sont loin d’être prohibitifs et n’empêcheront pas la croissance économique. D’après le GIEC, la « désinflation » de la consommation serait d’à peine 0,06 %. Et cette estimation ne tient pas compte des bénéfices engendrés par les mesures mises en place. Pour information, la mortalité liée à la pollution atmosphérique en Chine est évaluée à 10 % du PIB

En réalité, si nous sortons des combustibles fossiles, l’argent que nous économiserons en soins de santé (grâce à la réduction de la pollution de l’air) devrait nous permettre de compenser une partie importante des coûts liés à la transition énergétique. De plus, le passage aux énergies renouvelables sera bénéfique pour l’emploi. Les investissements réalisés par la Chine dans l’énergie solaire en 2010 avaient permis la création de 500 000 emplois. Et les scientifiques s’accordent à dire que si nous ne faisons rien, la facture sera bien plus élevée à l’arrivée.

10. Les efforts doivent être partagés mais équitables

La ville de Tacloban - Philippines, après le passage du typhon Hayan - novembre 2013

La ville de Tacloban – Philippines, après le passage du typhon Hayan – novembre 2013

Si nous voulons transformer l’ensemble de notre système énergétique dans un délai raisonnable, nous allons devoir tous mettre la main à la pâte.
Nous ne pouvons plus nous permettre d’attendre les bras croisés que les États du monde entier agissent à l’unisson. Chaque gouvernement doit prendre des mesures dans son pays, et montrer ainsi l’exemple pour créer un effet d’émulation. Par ailleurs, il ne faut pas oublier que les pays « riches » ont déjà émis de grandes quantités de CO2. C’est ce qui, d’ailleurs, leur a permis de s’enrichir. Ces pays sont donc en grande partie responsables de la crise climatique que nous traversons. Il faut aussi rappeler que les pays « pauvres », qui ont le moins contribué à cette crise, sont les plus durement touchés. Puis il y a certains pays, comme la Chine, qui sont en plein essor rapide et pourraient donner une impulsion positive.
Nous pensons que le principe du « pollueur-payeur » est un principe juste. Si nous voulons que les pays « pauvres » et les économies émergentes coopèrent dans la lutte contre les changements climatiques, nous devons respecter et appliquer ce principe. Les pollueurs doivent mettre la main au porte-monnaie, que ce soit au niveau national ou international. D’ailleurs, ça tombe bien puisque ce sont eux qui ont le porte-monnaie le plus rempli, c’est une question d’équité.

La publication de la dernière contribution au cinquième rapport d’évaluation du GIEC (AR5) est prévue pour le 2 novembre à Copenhague au Danemark. Pour une analyse détaillée de son contenu, voir le site du RAC : leclimatchange.fr