Lors du débat télévisé entre les deux finalistes du second tour, les dossier

Climat

Approximations, contre-vérités : les petites et grosses bêtises des présidentiables sur le nucléaire

Lors du débat télévisé entre les deux finalistes du second tour, les dossiers environnementaux n’ont pas été abordés. Seul sujet effleuré, en fin de ce (très long!) débat : le nucléaire. Mais les enjeux environnementaux ne se résument pas à la question nucléaire, et la question nucléaire ne se résume pas à Fessenheim !

À deux jours du second tour de l’élection présidentielle, petite revue des approximations, des contre-vérités et des vraies erreurs de nos deux présidentiables sur le nucléaire français.

Nucléaire & consensus ?

–> Nicolas Sarkozy: « Écoutez, le nucléaire depuis le général de Gaulle, François Mitterrand, Valéry Giscard D’Estaing, Jacques Chirac, ça fait l’objet d’un consensus. C’est un atout français.« 

FAUX !

Un consensus entre producteurs d’énergie et partis de gouvernement, mais sans les citoyens !

Les français n’ont jamais été consultés sur la question. En effet, aucun référendum ou consultation citoyenne n’a eu lieu en 40 ans d’existence de la filière nucléaire française … Ce qui semble d’ailleurs agacer les citoyens, 84% d’entre eux estiment n’être pas suffisamment consultée sur le nucléaire et l’énergie.

L’électricité moins chère ?

–> Nicolas Sarkozy: « Il y a 58 réacteurs, nous avons une électricité moins chère de 35 % que nos partenaires allemands.« 

FAUX !

Un coût du kilowattheure inférieur ne signifie pas nécessairement une facture moins élevée !En effet, en France, la consommation par habitant est largement supérieure, en raison d’un modèle énergétique inefficace et de nombreuses pertes en énergie.

La question importante n’est pas tant de savoir combien coûte 1 kilowattheure mais plutôt quelle quantité de kWh doit-on consommer pour se loger avec un confort de vie correct. Tout particulièrement dans un contexte économique tendu, et surtout parmi les ménages à faibles revenus !

Sûr, sûr ?

–> Nicolas Sarkozy: « Le nucléaire français est le nucléaire le plus sûr du monde, reconnu comme tel. »

FAUX !

–> Nicolas Sarkozy semble oublier, dans son élan de patriotisme économique, que la technologie utilisée en France n’a rien d’exceptionnel… c’est la copie d’une licence américaine de la société WestingHouse.

–> Nicolas Sarkozy: « Il n’y a aucune raison de fermer le nucléaire en France. Depuis que le nucléaire existe, nous n’avons jamais connu un accident grave.« 

FAUX !

La France a connu, en 1969, un accident, classé au niveau 4 sur l‘échelle INES, à la centrale nucléaire de Saint-Laurent-des-Eaux. Niveau 4 ? Accident (n’entraînant pas de risque important à l’extérieur du site) / Endommagement important du réacteur ou des barrières radiologiques, ou exposition létale d’un travailleur.
Et André-Claude Lacoste l’a dit et répété : l’Autorité de Sûreté Nucléaire ne peut garantir qu’il n’y aura pas d’accident nucléaire en France.

Enfin, notons que 1.107 incidents nucléaires ont été recensés en France en 2010 par l’ASN

–> Nicolas Sarkozy: « Juste un mot, les centrales nucléaires en Suisse, où les gens ne sont pas connus comme des gens qui aiment le risque, ont 60 ans, donc le problème n’est pas l’âge.« 

FAUX !

Encore une fois, Nicolas Sarkozy se trompe.

A ce jour, le réacteur qui a fonctionné le plus longtemps a été fermé au bout de 46,5 années au Royaume-Uni.

En Suisse, il y a 5 réacteurs nucléaires, répartis dans 4 centrales. Le plus ancien des réacteurs a été mis en service en 1969 dans la centrale de Bezna cela fait donc 43 ans en 2012, et non 60 ans comme l’affirme Nicolas Sarkozy.(source base de données PRIS de l’AIEA)

L’emploi ?

–> Nicolas Sarkozy : « C’est 240 000 emplois. C’est un avantage considérable pour notre industrie et pour nos compatriotes.« 

APPROXIMATIF !

240 000 c’est le chiffre d’emplois directs ET indirects du nucléaire… Pas ceux de l’industrie elle même. Ceci dit, réjouissons nous que le candidat président retienne ce chiffre, plutôt raisonnable en comparaison de ceux avancés par ses proches !

Comme Henri Proglio : « 1 million d’emplois seraient mis en péril et cela coûterait entre 0,5 et 1 point de PIB » , en novembre 2011. Ou Xavier Bertrand : « 400 000 emplois directs seront supprimés si l’accord entre les Verts et le PS voit le jour […]400 000 supprimés là, et en plus, un  million avec l’ensemble de la filière », jeudi 17 novembre, sur France Info

–> François Hollande : « Il faut savoir que l’Allemagne a 230.000 emplois dans les énergies renouvelables, nous seulement 50.000, donc il y aura une réduction de la part du nucléaire dans la production d’électricité« .

APPROXIMATIF !

C’est encore plus que cela.

En 2009, le gouvernement allemand chiffrait à 340 000 le nombre d’emplois consacrés aux énergies renouvelables, dont 102 000 pour l’éolien, 128 000 pour la biomasse et 81 000 pour le solaire3.

En 2010, les estimations faisaient état de 370 000 emplois, avec un développement très rapide du marché, le nombre d’employés ayant dans le secteur ayant doublé depuis 2004. Ce secteur employait alors 160 500 personnes.

Fessenheim ?

–> Nicolas Sarkozy: « Fessenheim avec 30 ans d’âge, figurez-vous, est plus sûr que quand Fessenheim a été inauguré.« 

–> François Hollande: « Nous aurons pendant mon quinquennat et le nucléaire et le renouvelable puisqu’il y aura une centrale qui fermera. Par ailleurs, vous savez que j’ai accepté, et ce n’était pas facile, de prolonger le chantier de l’EPR, chantier qui est quand même extrêmement lourd, qui a connu un certain nombre de vicissitudes« .

MATCH NUL : les deux candidats se trompent sur Fessenheim

Et oui, Nicolas Sarkozy : les centrales nucléaires, ça n’est pas comme le vin, ça ne se bonifie pas avec le temps !

La centrale de Fessenheim a déjà 35 ans. Une voiture qui atteint les 200 000 km ne sera jamais plus sûre qu’une voiture neuve… Et il en est de même pour les centrales nucléaires. Certaines pièces des réacteurs peuvent être changés comme les générateurs de vapeur, particulièrement sensibles, mais d’autres pièces majeures pour la sûreté ne peuvent pas l’être c’est notamment le cas de la cuve du réacteur et de l’enceinte de confinement qui contient cette cuve…

Quant à François Hollande, il ne sait pas compter :

Il est impossible de réduire de 75% à 50% la part du nucléaire dans le mix électrique à l’horizon 2025 en ne fermant qu’une seule centrale nucléaire et surtout en mettant en service le réacteur EPR en construction à Flamanville. L’équation de François Hollande ne tient donc pas.

Risque nucléaire : ils ne voient rien, ils… par gpfrance

L’ASN ?

–> Nicolas Sarkozy : C’est l’autorité de sécurité qui doit dire si on peut continuer ou si on ne peut pas continuer.

FAUX

L’instance de contrôle qu’est l’ASN (Autorité de sûreté nucléaire) joue un rôle central dans la mesure où elle vérifie si les règles en matière de nucléaire sont respectées.

Mais d’une part il existe une différence majeure entre « sûreté » et « sécurité » dans le nucléaire.

En termes de « sécurité » : risques extérieurs, attaques etc… l’ASN n’a malheureusement aucune compétence, contrairement à ce que semblait penser François Hollande interrogé sur le sujet le 2 mai au matin.… Aucune autre structure du reste, n’a cette fonction, ce risque n’est tout simplement pas envisagé !

D’autre part, en matière de sûreté (gestion des installations, de leur état…), compétence de l’ASN, si celle-ci participe à l’élaboration d’un certain nombre de ces règles, force est de constater qu’elle ne maîtrise pas l’ensemble des règles du jeu. Un certain nombre de décrets, d’arrêtés ou autres décisions relèvent du politique et l’ASN n’a pas son mot à dire. Il est trop facile de se défausser sur l’ASN en particulier et les experts en général. Et de leur faire porter une responsabilité éminemment politique.

Les renouvelables ?

–> Nicolas Sarkozy: « Deuxièmement, fermer Fessenheim, c’est 8 000 éoliennes en Alsace pour remplacer Fessenheim. Il ne nous faut pas le nucléaire ou le renouvelable, il nous faut le nucléaire et le renouvelable. »

FAUX !

Cette comparaison est caricaturale. Parce que la centrale de Fessenheim ne produit pas l’électricité d’Alsace : le système électrique français est centralisé et l’énergie voyage, y compris hors de nos frontières. Ce raisonnement géographique ne tient pas la route. Mais d’autre part parce qu’il ne s’agit en aucun cas de remplacer les centrales nucléaires uniquement par des éoliennes, mais bien par un mix d’énergies renouvelables et d’économies d’énergies.

Energies : il est temps de changer ! par gpfrance